Samira : on présente comme une victime un père qui menace de faire exciser sa fille si on le renvoie en Côte d’Ivoire

Un habile story telling peut transformer un bourreau en victime. Un sordide chantage à l’excision peut être travesti en croisade humaniste. C’est ce qui se produit en ce moment avec la mobilisation autour de Samira lancée par Raphaël Glucksmann. Samira est une petite fille ivoirienne de 10 ans. Elle et son père sont clandestins sur le sol français et le préfet a décidé leur expulsion. C’est logique, on ne peut pas expulser un homme adulte et faire rester en France son enfant de 10 toute seule sans sa famille. Omar Sy, Daphné Bürki, Leïla Slimani, Najat Vallaud-Belkacem … la pétition « Samira doit rester parmi nous » a réuni plus de 120 signatures, de nombreuses personnalités de gauche ont partagé la pétition réclamant que Samira et son père ne soient pas expulsés. « Si elle est expulsée, clament-ils en choeur, Samira risque l’EXCISION« . Ce story telling, en mettant en avant Samira (alors que c’est avant tout son père qui est visé par la procédure d’expulsion), fait passer l’Etat Français pour un bourreau, complice d’une excision qui sera commise sur une mignonne petite fille, et fait passer le père de Samira pour la victime d’un Etat fasciste. Mais le père de Samira est celui qui a autorité sur Samira, et si elle venait à subir une excision en Côte d’Ivoire, cela ne saurait arriver sans qu’il ait donné son accord. En somme, la description la plus fidèle de la situation n’est pas « Si la France renvoie Samira dans son pays, elle sera excisée« , mais : « Un clandestin ivoirien menace de faire subir une excision à sa fille Samira, âgée de 10 ans, si la France l’expulse conformément à la loi. »

Le coupable n’est pas l’Etat français mais les gens qui font exciser leurs filles

Le premier coupable des excisions dans le monde, ce n’est pas l’Etat français, c’est tout simplement les parents qui font exciser leurs filles. Au reste, la France est un des pays au monde les plus engagés dans la lutte contre l’excision. La France est à la pointe de la chirurgie réparatrice de l’excision, à laquelle elle forme des médecins africains, et investit des millions d’euros dans des plans de lutte contre l’excision en Afrique.

Certains pays sont un enfer pour les femmes. En Egypte, en Ethiopie, à Djibouti, en Somalie, en Erythrée, en Guinée, au Sierra Leone, au Soudan et au Mali, plus de 85% des filles sont excisées. Les populations additionnées de ces pays représentent 245 millions de personnes, soit environ 122 millions de femmes environ. 122 millions de femmes qui vivent dans un enfer misogyne et subissent d’atroces mutilations juste parce qu’elles sont nées femmes. La France peut-elle accueillir 122 millions de femmes et toute leur famille ? Qui peut dire laquelle de ces femmes mérite plus qu’une autre d’être sauvée de cet enfer machiste ? Sans compter que nous n’avons cité là que les pays où plus de 85% des filles sont excisées. En tout, il y a 29 pays d’Afrique qui pratiquent cette affreuse mutilation génitale.

Samira ne sera excisée que si son père le décide

La raison la plus probable pour laquelle le préfet a ordonné l’expulsion du père de Samira et de Samira malgré le fait que le père ait allégué qu’il avait migré en France « pour fuir l’excision », c’est que, à moins que le père ne décide lui-même de faire exciser sa fille, Samira n’encourt pas de risque d’excision.

C’est un secret de Polichinelle que les associations d’aide aux clandestins conseillent aux migrants de faire valoir un risque d’excision pour obtenir des papiers en France. Il suffit que vous ayez une fille et que vous soyez issu d’un des nombreux pays où l’excision existe, pour que les associations vous recommandent cette technique. L’Etat français se retrouve alors avec des piles entières de demande d’asile pour fuir l’excision, et doit démêler le vrai du faux. Logiquement, il accorde l’asile plutôt à ceux qui viennent de pays où l’excision est la plus omniprésente et à ceux qui parviennent à expliquer en quoi ils n’ont pas le choix. Le père de Samira a le choix.

La Côte d’Ivoire est un pays où l’excision est interdite par la loi, et où seules certaines régions du pays sont concernées massivement par l’excision. La prévalence de l’excision est de 36% en Côte d’Ivoire. En Egypte, elle dépasse les 90%. Et pourtant, dans l’Egypte des années 70, où l’excision était encore plus obligatoire qu’aujourd’hui, la jeune Sérénade Chafik, 8 ans, fut sauvée de l’excision par son père qui s’y opposa fermement.

Le tabou de la misogynie migrante

L’opération médiatique Samira surgit pile au moment où Marlène Schiappa a annoncé qu’elle ferait expulser les hommes étrangers auteurs de violences sexistes ou sexuelles. Par cette annonce, la Secrétaire d’Etat à l’égalité hommes-femmes a brisé un sujet tabou : celui de la misogynie migrante. L’immigration n’est pas toujours un enrichissement, elle est aussi souvent une arrivée massive d’hommes issus de cultures violemment misogynes.

L’affaire Samira est une diversion médiatique à l’annonce de Marlène Schiappa mais elle donne raison à celles, comme nous, comme Marlène Schiappa, qui pointons la nécessité de parler enfin de la misogynie migrante. L’affaire Samira montre en effet l’incapacité de la gauche française à admettre qu’un homme « dominé » selon la nomenclature gauchiste des oppressions, soit aussi un dominant, auteur de violences machistes. Parce que, oui, menacer de faire exciser sa fille si on ne vous donne pas de papiers, menacer de la laisser se faire arracher le clitoris et les lèvres à la lame de rasoir sans anesthésie, c’est déjà en soi une violence machiste.

Défendre des hommes misogynes violents est devenu une habitude des associations de défense des migrants, qu’elles soient laïques ou religieuses. Récemment, la Cimade s’est mobilisée pour empêcher l’expulsion d’un migrant centrafricain auteur de violences contre les femmes. En 2018, à l’occasion de la Journée Mondiale des Migrants organisée par l’Eglise catholique, un curé a organisé une collecte pour payer le logement d’Innocent (sic) Oseghale, migrant nigérian sous le coup d’une procédure d’expulsion pour trafic de drogue : c’est dans l’appartement payé par les fidèles que, deux semaines plus tard, il a assassiné et démembré une jeune femme italienne de 18 ans.

L’homme migrant a toujours raison et a toujours de bonnes excuses, dans le paradigme gauchiste. L’homme migrant est perçu comme un éternel enfant, jamais pleinement responsable de ses actes. S’il bat sa femme, c’est parce qu’il a été traumatisé par la violence dans son enfance. S’il fait courir des risques inconsidérés à sa femme et ses enfants en leur faisant traverser la Méditerranée (2000 euros par personne) sans gilet de sauvetage (10 euros), cela ne peut pas être un comportement de rapiat irresponsable, c’est juste de la faute des blancs. S’il dilapide toutes les économies de la famille pour aller en Europe dans l’espoir de devenir riche, alors que son pays d’origine n’est même pas en guerre, l’homme migrant ne peut pas être un mauvais père de famille qui gaspille l’argent de sa femme, il est nécessairement une victime. S’il fait porter le niqab à sa femme, ce n’est pas parce qu’il est un intégriste religieux misogyne, c’est parce que l’impérialisme des blancs est responsable du salafisme. Si un homme migrant menace de faire exciser sa fille, c’est forcément la faute de la France raciste. Si des pays entiers mutilent en masse les organes génitaux de leurs petites filles, et déclarent « impures » et indignes de mariage les femmes non-mutilées, c’est encore la faute des blancs, car même si les blancs dépensent des millions d’euros en campagnes d’excision, supplient les pays du tiers monde de daigner cesser d’arracher des clitoris, les payent pour qu’ils arrêtent, forment leur médecins à réparer les mutilations, ce n’est pas assez, et d’ailleurs, n’y a-t-il pas des relents coloniaux dans cette manière de demander aux Africains de cesser les mutilations génitales des fillettes ? C’est en tout cas ce qu’estiment un certain nombre de « féministes décoloniales ».

 

Il est temps d’appeler les bourreaux misogynes par leur nom et de ne plus se laisser berner par des bourreaux qui agitent leurs enfants-otages pour manipuler nos bons sentiments humanistes. Signataires de la pétition : vous croyez sauver une fillette de l’excision, vous ne faites que valider un cynique chantage à l’excision. Quand se mettra-t-on enfin à traiter les hommes migrants auteurs de violences misogynes comme des hommes adultes responsables de leurs actes ?